Chercheure d’histoire : Myriam Benzakour-Durand
Personne passée en entrevue : Barbara Beranek, responsable en communications
Date d’entrevue : 8 juillet 2021
Le Musée d’art de Rouyn-Noranda (MA) contribue au rayonnement des arts des Amériques par sa programmation multidisciplinaire. Situé dans le grand territoire du Nord-Ouest du Québec, le MA affirme l’importance de tisser des liens privilégiés et respectueux avec les populations autochtones et de rendre visible la diversité culturelle de la récente immigration en Abitibi-Témiscamingue.
Le projet du MA virtuel se résume en une galerie d’expositions virtuelles, dont l’objectif est de rendre accessible les expositions du musée à l’extérieur de la région, ainsi que d’offrir un soutien pédagogique et un accès accommodant au milieu scolaire.
L’idée du MA virtuel existait déjà un peu avant la pandémie. L’équipe travaillait sur un premier projet en partenariat avec Cuba avant décembre 2019, qui fut mis en ligne en 2020. La pandémie n’a fait qu’accélérer les choses avec la fermeture du lieu. Les ressources furent alors entièrement dédiées à rejoindre le public, à garder contact et à proposer une offre artistique continue par l’intermédiaire du virtuel.
Le défi : Maintenir une offre artistique et garder contact avec le public
Avec la fermeture du lieu lors des confinements de la première et de la deuxième vague de COVID-19, l’équipe du MA devait trouver comment maintenir l’offre artistique et le contact avec le public malgré les mesures sanitaires. Barbara Beranek, la responsable en communications du musée, a partagé ne jamais avoir employé les outils de diffusion en direct à travers les médias sociaux dans le passé.
Tranquillement, ils ont commencé à travers le pôle de médiation culturelle à proposer des cours de dessins en ligne avec des enfants. Puis, ils ont fait des capsules d’ateliers “Do it yourself” en vidéo. Ils ont aussi développé un projet virtuel pour rejoindre les personnes âgées chez elles en partenariat avec la société Alzheimer de Rouyn. Malgré les apparences de cafouillage liées à l’apprentissage lors de la mise en place des différents projets, l’utilisation de ces plateformes en ligne a rejoint les différents partenaires de manière très positive et avec une forte appréciation du contenu.
On a bien fait de le faire, parce que même si ça parait un peu croche au début, ce n’est pas grave. Les gens regardent plutôt le contenu au lieu du côté peut-être un peu plus cafouilli. Mais dans tous les cas ça nous a donné de nouveaux outils au niveau des réseaux sociaux. Et moi, de mon point de vue, je me rends compte que ça fonctionne. Les gens aiment ça.
L’innovation : Créer l’expérience muséale à l’écran
Afin de reproduire l’expérience vécue lors d’une visite au musée, les expositions comportaient une captation 360º, des images et des cartels qui accompagnent les œuvres. Pour supporter tous ces nouveaux éléments, l’équipe du MA a dû faire une refonte totale du site internet. Le MA virtuel est séparé du site du musée et repose sur une page lui étant entièrement dédiée. Une formation accélérée des responsables en communication et en médiation culturelle fut nécessaire pour maîtriser le maintien du site internet.
La captation 360º fut octroyée à une entreprise installée à Rouyn qui en est spécialisée, mais pour les commerces et l’immobilier. Ce partenariat a simplifié la tâche de l’équipe du Musée, puisqu’ils n’ont pas eu besoin de se former pour cette tâche, d’acquérir du nouveau matériel de photos et autres investissements matériels. De plus, lorsqu’ils rencontraient un problème technique ou lorsqu’il y avait un nouveau besoin, il suffisait de communiquer avec le prestataire qui faisait remonter la demande au développeur.
La fermeture du musée lors de la pandémie a obligé l’équipe à mettre en place le projet du musée virtuel très rapidement. Au lieu de travailler sur ce projet, tout en maintenant leurs activités régulières, le confinement aura eu comme point positif la concentration de l’ensemble des ressources (humaines et matérielles) sur le MA virtuel. Maintenant qu’il est en place, il ne reste plus qu’à l’alimenter en expositions virtuelles et à l’agrémenter d’outils pédagogiques pour la médiation culturelle. L’équipe est satisfaite d’avoir accompli rapidement ce projet et de s’y être concentrée.
Les finances : Subvention en rayonnement numérique
Le projet MA virtuel fut financé en totalité par la subvention en rayonnement numérique du Ministère de la culture et des communications du Québec.
Tous les frais étant couverts, l’accessibilité aux expositions est gratuite et le restera fort probablement.
Les leçons : Partenariats, prise de risque et prioriser un projet important pour atteindre de nouveaux publics
L’équipe du MA voulait initialement faire le projet du MA virtuel de manière autonome : ils comptaient se former pour faire les captations 360º, la programmation et autres, ainsi qu’acheter le matériel pour le faire. Finalement, le partenariat avec l’entreprise à Rouyn qui fait la captation 360º a simplifié énormément le travail, a réduit les coûts de production et a permis de créer des liens avec la communauté. Ce partenariat fut très bénéfique à tous les niveaux.
Ce projet a permis de mousser la mission du musée. Étant une vitrine pour les arts des Amériques, l’aspect virtuel permet vraiment de sortir de Rouyn et d’atteindre différents publics ailleurs au Québec, dans le reste du Canada et à l’international. En effet, sur 3 807 visites, 20 % proviennent du public canadien (hors Québec), 19 % de Cuba, 13 % des EUA, 5 % de France, 3,5 % d’Espagne et 2,3 % du Mexique. Cette large visibilité va permettre au musée de développer de nouveaux partenariats et devrait le propulser vers de nouvelles opportunités.
L’équipe du MA est très fière de ce projet. Elle ne l’aurait pas accompli aussi rapidement sans la situation pandémique. Comme disait Barbara : “C’était un bon “move” et c’est tombé au bon moment. La COVID nous a forcé à nous dépasser et à cogiter très vite”. Ils ont pris des risques, l’équipe a mis les efforts et les ressources, et ça a rapporté.